• Marco Lipszyc (suite)

    Marco Lipszyc (suite)

    Une question se pose au sujet de Marco Lipszyc : pourquoi, malgré son origine et son parcours (juif d'origine polonaise, ancien des Brigades internationales), s'est-il retrouvé à a tête des FPTF de l'Isère plutôt que dans les rangs des FTP-MOI (Main d'Œuvre Immigrée) ? Il y a à cela plusieurs explications. Marco est en France depuis 1933. Il était à Grenoble depuis 1938-1939 et il revient dans cette ville immédiatement après sa démobilisation, pour s'y lier, d'une façon très étroite, à une famille française. Tout au long de ces années, il a côtoyé, fréquenté, voire milité aux côtés de communistes français. Il se sent très intégré à la société française, peut-être même à la vie politique locale. Dans une lettre de novembre 1941 destinée à sa sœur, il écrit : "Je vis entièrement parmi les Français je ne parle plus polonais."

    Marco, qui de vient le responsable des FTPF de l'Isère en janvier ou février 1944, confirme à ce poste les qualités dont il avait fait preuve précédemment. Voici le témoignage de Monique Rolland, agent de liaison de Marco Lipszyc de février à mai 1944, avec qui elle a récupéré du ravitaillement pour confectionner des colis à des prisonniers politiques. De fil en aiguille, on lui confia des messages à transmettre, puis des armes à récupérer, et finalement intégrée aux FTP aux agents de liaison. Elle termina la guerre avec le grade de lieutenant comme responsable de liaisons de l'état-major FFI de l'Isère.

    "Mon premier rendez-vous avec Lenoir eut lieu à Fontaine, en face d'un cinéma qui n'existe plus  et qui se trouve près du pont sur le Drac.

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    Je crois me souvenir que je devais tenir un mouchoir dans une main et un tube de rouge à lèvres dans l'autre. J'avais déjà eu des rendez-vous avec des gens qui venaient des maquis et, en général, ils étaient plutôt mal habillés. Là, j'ai vu arriver un homme plutôt grand, élégant, bien habillé et je me suis dit : "Ca ne peut pas être lui". Il m'a posé la question : "Est-ce que le cinéma est permanent ?" C'était le mot de passe et j'ai répondu ce qu'il fallait. Je ne sais plus exactement quelle était la formule utilisée. C'était donc bien Lenoir, c'est-à-dire Marco Lipszyc. Nous avons marché côte à côte pendant une heure et il m'a expliqué ce que j'allais avoir à faire. Il m'a donné toutes sortes de conseils dont je peux dire qu'ils m'ont ultérieurement été d'une grande utilité, voire qu'ils m'ont sauvé la vie. Lenoir était vraiment un chef, quelqu'un qui a marqué ma vie comme celle de tous ceux qui l'ont connu et à qui il a laissé un souvenir extraordinaire. Il avait d'abord une grande expérience de la clandestinité. Il savait exactement ce qu'il fallait faire. Il était d'une très grande prudence. Je n'étais au courant que de ce que je devais savoir, moins on en sait, moins on a de choses à dire en cas d'arrestation et de torture. On ne peut pas dire des choses dont on ne sait pas. Pour moi, il était le commandant Lenoir. Je ne connaissais pas son nom véritable. Je ne savais même pas qu'il était polonais, encore moins qu'il était juif. Je crois que je savais quand même qu'il était marié parce que, un jour où il avait un peu le cafard, il m'a dit qu'il avait une petite fille qui était mignonne et qui jouait du piano avec un doigt. Assez souvent, il disparaissait durant deux jours en me disant qu'il allait en mission. En fait, j'ai su plus tard qu'il allait à Mens retrouver sa femme et sa fille. J'aurais d'ailleurs dû m'en douter, puisqu'il revenait presque toujours avec un gâteau de riz au chocolat que nous partagions. (...)

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    Il connaissait parfaitement tout ce qui se passait. Il décidait des actions à mener, et moi, j'allais généralement à bicyclette, de maquis en maquis pour transmettre ses ordres de mission et pour récupérer les comptes rendus d'action que les responsables de groupes me remettaient. Quand il m'envoyait quelque part, il ne m'y envoyait pas pour rien : il connaissait exactement la situation et savait ce qu'il y avait à faire.

    Grenoble dépendait de l'état-major interrégional des FTP de Lyon et nous y allions régulièrement en train. Nous voyagions comme si nous étions en couple. C'était une façon de passer plus ou moins inaperçus. Un homme seul de l'âge de Lenoir aurait été infiniment plus suspect. Nous voyagions en première classe pour apparaître encore plus respectables. Une amie qui travaillait dans un magasin de confection me fournissait en habits les plus convenables possibles. Lenoir, lui, était toujours très élégant. A Lyon, nous rencontrions un responsable interrégional avec lequel Lenoir s'isolait et s'entretenait, alors que moi, j'allais faire un tour avec l'agent de liaison du Lyonnais (comme je l'ai dit, en couple, on se faisait toujours moins remarquer). Je me souviens aussi, qu'un jour, avenue Alsace-Lorraine, nous avons joué les amoureux, Lenoir et moi, appuyés contre un arbre, pour surveiller les allées et venues d'un personnage qui, à mon avis, devait être éliminé. Je ne saurais absolument pas dire ce qui s'est passé à la suite de ce repérage, car je n'ai pas été mise au courant. (...) Je pourrais multiplier les souvenirs concernant Lenoir. Ce qui est certain, c'est que c'était vraiment quelqu'un, c'était vraiment un chef, au meilleur sens du terme Il était au-dessus de tout le monde."

     

    (Sources : Mappy.com ; Marco Lipszyc : étranger et notre frère pourtant - Claude Collin)

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