• Pierre Fugain évoque Paul Vallier

    Témoignage de Pierre Fugain, qui évoque Paul Vallier (cf.  Quelques figures de la Résistance iséroise)

    « Je rencontrais Paul Vallier et quelques-uns de ses gars une ou deux fois par semaine dans un café de la place Championnet (1) ou de la rue Irvoy ou encore dans un repaire du bois des Vouillants*. Je lui donnais la liste des agents de l’ennemi les plus dangereux, soit pour les détruire, soit pour enquêter à leur sujet. Je lui fournissais les faux papiers d’identité, cartes de travail et ausweis. Il nous assurait en contrepartie du secours immédiat de son groupe franc, en cas de besoin.

    Pierre Fugain évoque Paul Vallier 

    (…) Ces réunions en pleine ville de cinq ou six têtes brûlées qui tripotaient leurs armes avec une impatience et une imprudence ahurissantes, qui préparaient les coups les plus durs avec l’air de s’en amuser, me changeaient à ravir de la discipline stricte du réseau. Ce côté casse-gueule et terroriste m’allait bien.

    Un matin, nous étions ainsi réunis dans un bistrot à l’angle de la rue Condorcet (2). Nous discutions et plaisantions, lorsque : « Attention les gars ! » deux tractions de la milice pleines à craquer s’arrêtent le long des vitrines, à quelques mètres de nous. Paul, calme, donne entre les dents des ordres précis :

    « A mon signe, vous couchez les tables en marbre et tirez dès qu’ils approchent des portes ». Il me semblait heureux. A part les chauffeurs restés au volant, les miliciens descendent de voiture, claquent les portières…s’engouffrent dans la droguerie d’à côté, en sortent aussitôt avec des balais et quelques paquets, remontent en voiture et disparaissent dans la rue Condorcet. Ces messieurs venaient aux commissions. Ce fut un éclat de rire dans le bistrot. Paul commanda une nouvelle tournée…un peu déçu.

    (…) Paul Vallier jouait avec la mort, la défiait. Le risque était sa drogue : il en avait besoin. (…) Quelques heures avant d’être assassiné, je l’avais rencontré dans un magasin de photographie, voisin du siège de la milice, place Victor-Hugo (3). Sa moto tournait au ralenti contre le trottoir : « Tu tombes bien ! me dit-il, attends-moi : je vais acheter une caméra pour filmer nos attaques. Si j’en trouve une, je t’emmène l’essayer ». Il ne trouva pas sa caméra. Elle aurait été d’ailleurs inutile : ce jour-là, il avait rendez-vous avec la mort. Les miliciens d’Eclache l’attendaient à son garage, à Fontaine. On compta sur son corps 27 impacts de balles.

     

    * A Fontaine

    Extrait de Ici l'ombre - Pierre Fugain.

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