• Durant l'occupation de Grenoble par les Allemands, Louis Nal commandait les Groupes Francs. Robert Favier était son adjoint : il raconte comment lui et son groupe ont fait exploser le fort des Quatre-Seigneurs (sur la commune d'Herbeys).

    "Sans attendre la capitulation de leur pays, le 8 septembre 1943, les Italiens évacuèrent les différents ouvrages dont ils étaient censés assurer la garde, en particulier le fort des Quatre-Seigneurs (situé sur les contreforts du massif de Belledonne), où étaient murés d'importants stocks de munitions et d'explosifs. Les Allemands, probablement à court d'effectifs, ne prirent possession des lieux qu'à la mi-journée du 12 septembre 1943. Au cours de ce laps de temps, Louis Nal décida de récupérer un maximum de trésors emmurés, d'une part pour les soustraire aux Allemands, et surtout pour alimenter la résistance qui allait en avoir de plus en plus besoin.

    C'est le groupe Roux-Fouillet, dont le PC était situé à la ferme Armand au Mûrier (entre les communes de Gières et de Saint-Martin d'Hères), qui fut désigné et auquel s'adjoint Paul Vallier. (...) Il fallait faire vite, car nous savions qu'à la suite d'une dénonciation, les Allemands disposaient de l'inventaire exact du matériel camouflé dans l'ouvrage, et de ce fait risquaient de ne pas tarder à l'investir. Seuls restaient au fort un sous-officier et son épouse, mais ils durent tout abandonner sur place, et quitter la région : ils furent partiellement dédommagés par la suite.

    L'enlèvement dura 48 heures et nécessita pas mal de voyages à l'issue desquels un matériel considérable fut enlevé et réparti dans différentes caches. Le 12 septembre 1943 vers 11 heures, Paul Vallier monta au fort à vélomoteur et, la voie étant toujours libre, mit en place plusieurs "crayons" détonateurs. Le retard prévu pour le déclenchement était de deux heures.

    En redescendant vers le Mûrier où l'attend le Groupe Franc de Roux-Fouillet, il croise un car d'Allemands qui viennent occuper les lieux. A 13 heures, rien ne se passe. Ni à 14 heures, ni à 15 heures : l'inquiétude va grandissante. Enfin, vers 15h30, une formidable explosion fait tout vibrer à plusieurs kilomètres à la ronde. Le fort vient de sauter avec les Allemands, dont il ne reste rien.

    Nos ennemis procédèrent à une enquête très poussée à l'issue de laquelle ce sont les Italiens qui furent soupçonnés d'avoir miné le fort. Cette conclusion était parfaitement plausible, et elle évita ainsi de graves représailles contre la population locale.

    Schématiquement, ces crayons étaient composés d'une ampoule emplie d'acide qui, une fois libéré (en retirant une languette ou une goupille), venait ronger un fil métallique dont la rupture déclenchait l'explosion. C'était la section variable du fil qui avait conditionné le retard d'allumage : il était évident que cela ne pouvait être extrêmement précis. Vallier a également pu se tromper et prendre des engins de trois ou quatre heures de retard à la place de ceux de deux heures.

    Le Groupe franc Roux-Fouillet, composé de 15 hommes, fut malheureusement anéanti le 4 janvier 1944. Ce jour-là, 12 d'entre eux furent arrêtés, transférés à la Gestapo de Grenoble, puis déportés au camp de Mathausen. 7 seulement en revinrent, tous profondément marqués par les terribles épreuves endurées. Elie Roux-Fouillet décéda en déportation au camp de Mathausen, quelques jours seulement avant l'arrivée des Américains, qui eut lieu le 5 mai 1945.

     

    (Sources : Flashes sur la Résistance en Isère - Robert Favier (d'après les notes de Camille Armand) ; mappy.com)

    Yahoo!

    votre commentaire
  • Durant l'occupation de la France par les Allemands, Louis Nal commandait les Groupes Francs. Robert Favier était son adjoint : il raconte quelques souvenirs de Résistance.

    "La pression exercée par les Allemands (et leurs séides, les miliciens) devenant de plus en plus forte, et seuls leurs véhicules et ceux de quelques corps de métiers indispensables ayant encore le droit de circuler, je décidai le 21 mars 1944, d'aller le lendemain planquer à Fontaine le dernier engin motorisé que j'utilisais encore quelquefois. En ville, on ne voyait plus que quelques cyclistes et les quelques véhicules précités. Le seul fait d'utiliser un moteur quel qu'il soit entraînait une suspicion extrêmement grave et prouvait que l'on était en possession de carburant : en cas de contrôle, il eut fallu en indiquer la provenance. N'étant pas inscrit sur le registre des ayants droit, il ne restait comme explication que le marché noir ou pire : la Résistance. C'était là une véritable imprudence qu'il valait mieux ne pas commettre si on ne voulait pas de complications (...). Il est évident néanmoins que nous étions contraints et forcés de déroger à ce principe, par exemple pour un enlèvement de ravitaillement, de tabac, ou pour procéder à une destruction de matériel ou d'usine.

    Le 22 mars 1944, j'emmenais donc ma moto de Grenoble à Fontaine, chez des amis. Pour ce faire, j'empruntais le pont sur le Drac, qui relie le Cours Berriat à l'avenue Aritide-Briand. Vers le milieu de l'ouvrage quasiment désert, je vis arriver une autre moto en sens inverse. Reconnaissant ses passagers, je saluai d'un signe de la main au moment du croisement, mais je n'obtins aucune réponse. Paul Vallier (Gariboldy) pilotait et Jean Bocq (Jimmy : son adjoint) avait pris place sur le tan-sad (siège arrière). Je subodorais l'endroit où ils se rendaient et, de retour à Grenoble, à vélo, je fis un petit détour pour passer rue de l'Elysée (actuellement Max-Dormoy). M'arrêtant à l'angle de la rue Mozart, j'aperçus la moto 250 cm3 New-Map une centaine de mètres plus loin.

    Focus sur : Robert Favier

    Ils étaient dans la maison inoccupée des parents de Paul, qui se trouve à l'angle des deux rues. Je frappai plusieurs fois et de plus en plus fort. Enfin la porte s'entrouvrit précautionneusement, puis toute grande lorsqu'ils m'eurent identifié. Ils rengainèrent leur pistolet automatique. Je leur demandai s'ils m'avaient vu, un moment plus tôt, sur le pont : la réponse fut négative. Je leur expliquai alors, en insistant fortement, à quel point il était suicidaire de circuler en ville autrement qu'à pied ou à bicyclette et que ce qu'ils faisaient était la meilleure façon d'attirer l'attention sur eux. Ce qui n'était pas, et de loin, le but recherché.

    Je ne sais si mon avertissement aurait porté ses fruits mais il n'en a pas eu le temps, car le soir même, Paul Vallier et Jimmy Bocq tombèrent dans une embuscade à Fontaine : Paul fut tué en essayant de protéger Jimmy déjà blessé. Ce dernier put s'échapper mais subit le même sort, ainsi que Bob Tarze à Saint-Nizier, en tentant de venger Paul Vallier, leur chef et ami."

    Focus sur : Robert Favier

     

    (Sources : Flashes sur la Résistance en Isère - Robert Favier (alias Mattras) ; mappy.com)

    Yahoo!

    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires