• N.B : les adresses citées dans cet article correspondent à des lieux grenoblois (et uniquement grenoblois). Le plan ci-dessous peut vous permettre de vous repérer.

    Chronologie : de 1944 à la Libération

     Janvier 1944 : réquisition de la brasserie de la Paix comme des deux immeubles du 43 avenue Alsace-Lorraine pour y installer la Soldatenheim (foyer du soldat allemand). Ce lieu étant une cible potentielle pour les terroristes, les habitants doivent fermer les fenêtres dès la tombée de la nuit et exercer une "surveillance des maisons en ce qui concerne toute présence étrangère" : chaque habitant est tenu pour personnellement responsable en cas d'attentat. De plus, l'état français prend en charge les frais occasionnés.

    25 janvier 1944 : réunion dite "Monaco" à Méaudre : le Comité Départemental de Libération Nationale est fondé.

    Février 1944 : Aloïs Brunner arrive à Grenoble : des centaines de Juifs sont arrêtés, détenus à l'hôtel Suisse et Bordeaux (près de la gare) et déportés à Drancy. Cf. "Hôtel Suisse & Bordeaux".

    9 mars 1944 : afin d'assurer une partie de son financement, la Résistance doit puiser dans les caisses publiques administrées par Vichy. L'action la plus significative est le hold up de la Poste centrale. Il est réalisé par Paul Vallier et Jean Bocq : ils récupèrent 6 millions de Francs. Paul Vallier place l'argent dans une valise. Georges Bois, membre de Combat, retrouve la valise le lendemain de l'assassinat de Paul Vallier : 3 millions sont remis au maquis du Vercors, 1 million au service social des MUR, un autre million est remis aux MUR, 400.000 Francs pour le maquis de l'Oisans et le reste est attribué au Groupe Franc Combat. Ci-dessous : la valise de Paul Vallier.

    Chronologie : de 1944 à la Libération

    23 mars 1944 : la Gestapo et les hommes du milicien Ernest Jourdan arrêtent quinze enfants et jeunes gens au lieu-dit La Martellière, à Voiron, et les déportent. Les prisonniers seront transférés à la Caserne de Bonne, puis déportés à Auschwitz.

    Les services de police allemands communiquent à la préfecture la liste des appartements vacants appartenant à des Juifs : le mobilier en est pillé ou vendu aux enchères et des régisseurs d'immeubles prennent possession des lieux.

    6 Avril 1944 : rafle rue des Minimes, à Saint-Martin d'Hères.

    Extrait du récit de la préparation de la rafle (source : Archives Départementales de l'Isère) : "Lieu : Rue des Minimes - quartier Croix-Rouge. But : rechercher des oisifs, individus douteux, examen situation des étrangers, toutes les personnes seront interpellées et identifiées (examen minutieux des cartes d'identité). Les recherches seront poursuivies dans les immeubles et des visites domiciliaires effectuées dans tout le secteur considéré (recherche des armes, explosifs, tracts, objets suspects). - Dispositif du service : blocage de l'îlot de la rue des Minimes par trois barrages et un cordon de surveillance, échelonné dans les terrains situés derrière les immeubles de la rue des Minimes et sur la rue de la Plaine. Heure : 12 heures 45. Commencement de l'opération : immédiatement après la mise en place. Effectifs : commissaires : 3 inspecteurs : 20 gardiens de la Paix : 30 Gardes Mobiles de Réserve (GMR) : 16 Véhicules : autocar Corps Urbain : 1 camionnette GMR : 1 voiture Police Judiciaire : 1 (...)

    Des équipes d'inspecteurs et de gardiens seront constituées, les premiers procédant aux interpellations sous la protection des gardiens prêts à faire éventuellement usage des armes. Les gardiens de surveillance empêcheront toute fuite des immeubles vers les jardins avoisinants, les individus retenus seront conduits au car qui stationnera à proximité du secteur et transportés en fin d'opération Caserne Bizanet où ils feront l'objet d'un examen approfondi par M. le Commissaire de police Y.

    (...) En fin d'opération, dresser une liste des individus définitivement retenus avec mention de l'inculpation dont ils font l'objet.

    (...) Le bilan de l'opération : (...) il a été procédé tant par le service de la P.J sous la direction de M. B et le service de Sécurité Publique, sous ma direction, à 98 visites domiciliaires. Il a été procédé d'autre part, à la vérification des papiers d'identité de 196 personnes. 4 arrestations ont été opérées dont 3 ont été maintenues, à savoir :

    1) B. A né en 1896 à Zgierz (Pologne) Juif polonais pour dissimulation d'identité d"état civil

    2) C. L né en 1926 à Albox (Espagne) de nationalité espagnole pour défaut de renouvellement d'autorisation de séjour

    3) K. Y né en 1902 à Konia (Asie Mineure) de nationalité arménienne pour trafic de rabac et denrée contingentée

    Les opérations se sont terminées à 15 heures, sans aucun incident".

    Nuit du 20 au 21 avril 1944 : assassinat du milicien Ernest Jourdan à Voiron. Il rançonnait ou dépouillait les Juifs et les Résistants après avoir favorisé leur déportation. Cela déclencha des représailles envers les Juifs de la région.

    Mai 1944 : Un Comité d'Action Immédiate organise la coordination des différents Groupes Francs, sous la direction de Louis Nal.

    Marco Lipszyc est blessé lors d'une attaque de la Gestapo. Ouvrier à Merlin-Gerin, il avait organisé et participé à de nombreuses actions clandestines en Isère, dont la destruction de transformateurs destinés à l'armée allemande. Il sera fusillé le 21 juillet.

    4 mai 1944 : décret élevant Grenoble au titre de Compagnon de la Libération (après Nantes, mais avant Paris, Vassieux-en-Vercors et l'Ile de Sein). Mobilisation des Francs Tireurs et Partisans.

    6 mai 1944 : arrestation du chef des FFI, Reyniès : le Commandant Alain le Ray lui succède.

    A partir de juin 1944 : mobilisation du maquis du Vercors

    13 juin 1944 : Le Groupe Franc de Louis Nal s'empare des armes entreposées au Palais de Justice de Paix, au 7 quai Créqui. Faisant croire à un déménagement, les Résistants chargent deux camions de grands sacs contenant des armes et des munitions. Les camions rejoignent Vizille sans rencontrer de contrôle. La Résistance a pu ainsi être ravitaillée en armes et en munitions.

    Du 13 au 15 juin 1944 : bataille de Saint-Nizier.

    3 juillet 1944 : la République libre du Vercors est proclamée par Eugène Chavant. Yves Farge, Commissaire de la République nommé par le Général de Gaulle, assiste à la cérémonie, pour assumer tous les pouvoirs publics après la libération. Saint-Martin-en-Vercors en est la capitale.

    11 juillet 1944 : attaque de la poudrière du Murier par la Résistance (cf. "Focus sur : la bataille de Gières")

    14 juillet 1944 : Vassieux-en-Vercors est réduit en cendres par l'aviation allemande : 25 habitants sont tués.

    17 juillet 1944 : la Wehrmacht incendie plusieurs maisons, fusille deux otages et pend cinq jeunes gens à Voreppe.

    Du 21 au 23 juillet 1944 : le plateau du Vercors est attaqué par les Allemands, qui bloquent tous les accès au plateau et  la Luftwaffe bombarde les localités alentours : la défense des maquisards est anéantie deux jours plus tard, car les promesses de parachutage de matériels de la part de de Gaulle à Chavant n'ont pas été tenues. Le commandant militaire des forces du Vercors, François Huet, ordonne la dispersion des groupes de maquisards. 82 habitants sont massacrés à Vassieux-en-Vercors.

    Le 21 juillet, Mario Lipszyc est fusillé à Seyssinet.

    27 juillet 1944 : la Wehrmacht cerne la grotte de la Luire, considéré comme "l'hôpital du maquis" : les blessés furent exécutés et les infirmières déportées.

    Au total, le Vercors a coûté 639 tués aux combattants et 201 aux civils. Seulement une centaine d'Allemands ont été tués dans les combats et une cinquantaine de blessés sont décédés par la suite à Grenoble. 573 maisons ont été détruites, 41 habitants de Vassieux déportés.

    29 juillet 1944 : attaque de la biscuiterie Brun par le maquis (cf. "Focus sur : la biscuiterie Brun de Saint-Martin d'Hères").

    1er août 1944 : exécution du préfet Frantz à la villa des Cèdres de Corenc. Membre du PPF, il collaborait avec l'occupant. Zélé, le Comité Départemental de Libération Nationale l'avait condamné à mort en juillet 1944. Le 31 juillet, les 4 membres de la Résistance chargé de cette mission dînent ensemble à La Bajatière. Ils reçoivent un renseignement précieux de la part d'un employé de maison d'un ami du préfet, M. Besson. Celui-ci doit recevoir chez lui quelques amis, dont le préfet Frantz et Biessy, le secrétaire général du petit Dauphinois. Les quatre hommes mandatés se rendent au PC de La Tronche, puis partent à vélo pour Domène pour retrouver Nal, le chef des Groupes Francs. Les modalités d'action incombent au groupe d'Aimé Requet. En début d'après-midi, la seule voiture à la disposition du groupe de Nal (une Peugeot 402) ne démarre pas. Le groupe de Requet se rend à Montfleury, et profite d'une alerte pour avoir la route dégagée. Le groupe place un fusil mitrailleur devant la villa pour surveiller l'entrée du parc. Une rafale est tirée pour couper toute possibilité de fuite de la part des invités. L'un des résistants s'avance et demande :

    - Qui est le préfet ?

    Biessy voulant se faire passer pour lui est retenu par Frantz, qui répond :

    - C'est moi !

    Frantz et Biessy sont immédiatement abattus. Les Résistants s'enfuient avec la voiture du préfet. A 17h30, le groupe de Requet retrouve Nal pour un compte-rendu.

    L'appareil vichyssois est décapité avec cette mort.

    Du 9 au 22 août 1944 : combats de l'Oisans. Début de l'opération Hochsommer : la 157ème division de la Wehrmacht a pour mission de dégager la route vers Briançon, puis l'Italie.

    11 août 1944 : la Wehrmacht brûle une dizaine de maisons au Cheylas (hameau du Villard).

    14 août 1944 : vingt maquisards fusillés au 153 cours Berriat (Cf. La rafle du cours Berriat).

    15 août 1944 : le débarquement en Provence oblige les Allemands à se replier. Le 20 août, les forces anglo-américaines sont à Gap ; le 21, aux cols Bayard, puis de Lus-la-Croix-Haute, elles établissent la jonction avec les maquisards de la Drôme, des Hautes-Alpes et de l'Isère et arrivent à Vif : elles affrontent les Allemands à Pont-de-Claix et arrivent à Grenoble le 22. Les membres du CDLN s'installent à la préfecture et remettent en marche la vie républicaine.

    Nuit du 21 au 22 août 1944 : le Général Pflaum décide d'évacuer Grenoble, après avoir fait sauter les ponts sur le Drac et incendier les archives de la Gestapo. au matin, les maquisards et les groupes francs investissent la ville, rejoints par les Américains. Les derniers détachements ennemis se rendent dans la cour du château de Vizille.

    Conformément aux décisions du CDLN, Albert Reynier devient préfet ; Frédéric Lafleur est maire de Grenoble ; le Commandant Le Ray chef des FFI de l'Isère.

    Cependant, une unité de la Wehmacht tente de revenir par la vallée du Grésivaudan : des combats éclatent entre les Américains et des FFI du secteur de Grenoble-Basse-Romanche et du Grésivaudan à hauteur de Gières.

    22 août 1944 : arrivée des troupes américaines à Grenoble, qui défilent sur le cours Jean-Jaurès.

    La formule "Travail, Famille, Patrie" est effacée des frontons des mairies au profit de "Liberté, Egalité, Fraternité", de même que les Marianne reprennent place, après avoir été démolies par le régime de Vichy. L'ancien Résistant Frédéric Lafleur devient maire. Les divers réseaux de Résistance se réunissent devant la préfecture : Albert Reynier est désigné préfet (officialisation le 28 août). L'épuration extralégale (contre les membres de la milice) a lieu cours Berriat, tandis que l'épuration légale est mise en place par deux ordonnances :

    • Une "Cour de Justice" est instituée afin d'établir les "faits de collaboration",
    • Le statut d'"indignité nationale" est créé, permettant de déchoir (temporairement ou définitivement) les personnes jugées coupables.

    23 août 1944 : libération de Bourgoin.

    24 août 1944 : Bataille de Gières-Domène : bloqués dans leur retraite à Montmélian, les Allemands capitulent à Domène. Le combat clandestin est terminé (cf rubrique "Focus sur...").

    26 août 1944 : découverte d'une fosse commune près du polygone d'artillerie (chemin des Buttes, au confluent du Drac et de l'Isère). 25 corps sont découverts dans un état abominable : les victimes ont été exécutées par les Allemands quinze jours plus tôt. Un second charnier est mis à jour deux jours plus tard, avec 23 cadavres, ayant été fusillés en juillet. Seules 29 de ces victimes ont pu être identifiées. Elles ont été tuées dans le dos, par des rafales de mitraillette, après avoir subi des sévices et des brutalités. Le massacre est atribué à Ernst Floereck, le "saigneur de la Gestapo". Début septembre, un autre charnier contenant quatre dépouilles est découvert à Fontaine.

    Le chemin des Buttes a été rebaptisé rue des Martyrs à la Libération, pour rendre hommage à ces hommes. Ci-dessous : pan du mur situé à l'emplacement du charnier.

    Chronologie : de 1944 à la Libération 

    1er septembre 1944 : libération de Vienne.

    2 septembre 1944 : la Cour Martiale de justice se réunit pour la première fois (au palais de justice) pour juger 10 miliciens arrêtés par la Compagnie Stéphane à la mairie de St-Martin d'Uriage : 6 sont condamnés et fusillés le jour même. D'autres procès suivront.

    5 novembre 1944 : venue du Général de Gaulle à Grenoble. C'est place Pasteur (lieu des arrestations massives du 11 novembre 1943) qu'il remet à Frédéric Lafleur la croix de la Libération.

    5 décembre 1944 : le conseil municipal de Grenoble décide de dédier une place au Doyen Gosse, une autre à Paul Vallier, une avenue à Jean Perrot, un cours à la Libération, une rue au Vercors, un square aux fusillés et un chemin aux martyrs. 

     Mai 1945 : les déportés rescapés des camps de concentration reviennent à Grenoble. Leurs familles et des Résistants les attendent.

      

     

    (Sources : dossier de presse sur l'exposition "LE PETIT DAUPHINOIS de 1939 à 1944" : Musée de la Résistance et de la Déportation de l'Isère ; 1939-1944 Grenoble en résistance : parcours urbains ; Sentiers de la liberté dans les Alpes : 1938 1945 Guerre, Résistance, persécution des Juifs ; 1939 1945 L'Isère en Résistance : l'espace et l'histoire)

     

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  • 2 septembre 1939 : le Royaume-Uni et la France déclarent la guerre à l'Allemagne, au lendemain de l'invasion de la Pologne. L'événement fait la une du Petit Dauphinois (le principal journal des Alpes du Nord) le 4 septembre. Lieu de garnison, Grenoble est immédiatement mobilisée : elle est engagée avec les 3.800 hommes de la 27ème division alpine.

    17 juin 1940 : le Maréchal Pétain annonce à la radio : "C'est le coeur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat."

    19 juin 1940 : les Grenoblois découvrent l'appel du général de Gaulle dans le Petit Dauphinois.

    23-24 juin 1940 : bataille de Voreppe : le Général Cartier stoppe l'armée allemande.

    10 juillet 1940 : les pleins pouvoirs sont attribués à Pétain par l'assemblée. Parmi ceux qui les refusent, trois députés isérois : Séraphin Buisset, Lucien Hussel et Léon Martin. René Gosse, doyen de la Faculté des Sciences de Grenoble, écrit simultanément au Maréchal pour lui dire qu'il devra un jour rendre des comptes aux Français : il sera révoqué à la fin de l'année par Vichy, et assassiné par les Gestapistes en décembre 1943.

    24 juillet 1940 : Fort Barraux devient un centre d’internement pour « Français non désirables ». De 1940 à 1942 y sont internés plus de 800 hommes (syndicalistes, responsables et militants communistes, juifs étrangers, délinquants économiques [= marché noir], ainsi que des prisonniers de droit commun).

    29 août 1940 : Création de la Légion Française des Combattants, sur l’initiative du Maréchal Pétain. Elle regroupe des personnes défavorables à un parti unique souhaité par les collaborationnistes et les admirateurs du « héros de Verdun » (ci-dessous : le drapeau de la section de Lancey). Légion Française des Combattants (section de Lancey)

    3 octobre 1940 : Premier statut sur les Juifs.

    Novembre 1940 : installation de l'école nationale des cadres d'Uriage dans le château de Saint-Martin d'Uriage (dirigée par Pierre Dunoyer de Ségonzac). Elle est dissoute en décembre 1942 : les instructeurs passent dans la Résistance, tandis que la milice y installe son école nationale des cadres en janvier 1943 (Paul Touvier y passe), puis elle devient une école militaire à partir de 1946.

    30 novembre 1940 : le préfet Dikowski disposant de la possibilité d'interner n'importe qui sur simple décision administrative, la police grenobloise procède à l'arrestation de militants communistes, qui sont ensuite emprisonnés à Fort Barraux. Le tribunal correctionnel de Grenoble condamne les personnes arrêtées en possession de tracts ou coupables d'avoir écouté Radio Londres.

    19 mars 1941 : Visite du Maréchal Pétain à Grenoble. Il passe en revue le bataillon des Chasseurs Alpins, dépose une gerbe au monument des Diables Bleus et assiste à un défilé militaire. Il se rend ensuite à la préfecture et s’entretient avec des vétérans de la guerre de 1914-18. Il visite quelques écoles et entreprises avant de se rendre au monument aux morts de la Porte de France. Le lendemain, il se rend à Vienne. Ci-dessous : la une du Petit Dauphinois.

    Chronologie : de 1939 à 1941

    Jean Fangeat (le rédacteur en chef du Petit Dauphinois) écrit lors de la venue du Maréchal ce jour-là : "Le Maréchal est là. Il va prendre possession de notre ville et de nos coeurs. Et cette visite entrera dans les fastes de notre histoire urbaine. Elle fera date. Elle fera image (...) ". A l'issue de la visite du Maréchal, le Petit Dauphinois écrit encore : "Grenoble apparait aujourd'hui à tous ce qu'elle est dans le tréfonds de son âme : une des plus solides bastilles du patriotisme, de l'ordre, de la générosité, c'est-à-dire de la France nouvelle, celle qui naît sous nos yeux, le visage dur, decrispé et résolu des cendres et du feu de ce qui n'est plus".

    10 mai 1941 : Le Mouvement de la Jeunesse Sioniste est créé, afin de "rassembler les jeunes Juifs dans un esprit de résistance morale par l'éducation, par la connaissance du judaïsme et par une fraternité d'idéal sioniste." La section de Grenoble a établi son siège au 7 rue Jean-Jacques Rousseau et est connue comme l'une des plus actives de la Résistance juive. Elle est dirigée par Otto Giniewski (dit "Toto") et Georges Schnek.

    2 juin 1941 : promulgation du second statut sur les Juifs.

    22 juillet 1941 : loi relative aux entreprises, biens et valeurs appartenant aux Juifs, base juridique de "l'aryanisation" des biens.

    29 mai 1942 : obligation pour les Juifs de porter l'étoile jaune en zone occupée.

    17 juin 1942 : rencontre entre les Généraux Giraud (évadé depuis peu et cherchant des appuis pour organiser un soulèvement) et Weygand (le Commandant suprême des armées limogé par les Allemands) au château des Alloves à Saint-Martin d'Hères : ce dernier refuse d'organiser un soulèvement pour ne pas désobéir à Pétain.

    14 juillet 1942 : 1.500 personnes manifestent devant le monument des Diables Bleus.

    26 août 1942 : suite à la rafle du Vel' d'Hiv', les policiers procèdent à une rafle de 353 Juifs étrangers : ils sont rassemblés à la caserne Bizanet (au 51 avenue Maréchal Randon). Après contrôles, 98 d'entre eux sont partent pour Vénissieux, puis Drancy, et sont déportés à Auschwitz.

    20 septembre 1942 : 2.000 personnes manifestent pour le 150ème anniversaire de la bataille de Valmy.

     

    De novembre 1942 à septembre 1943 : occupation italienne

     

    Suite au débarquement des alliés en Afrique du Nord le 8 novembre 1942, les Allemands envahissent la zone libre le 11 : ils laissent les Italiens occuper les 7 départements à l'Est du Rhône, dont l'Isère. Sous le commandement du Général de Castiglioni, la division Pusteria arrive à Grenoble. Castiglioni n'est pas un fervent partisan de Mussolini : comme d'autres officiers italiens, il n'admet pas la persécutuon des Juifs. Il va obtenir du préfet Didkowski la libération des Juifs que ce dernier venait de faire arrêter. Profitant de cette attitude compréhensive, des organisations clandestines vont émerger, telles le MJS (Mouvement des Jeunesses Sionistes) et le CDJC (Centre de Documentation Juive Contemporaine).

    L'armée italienne ne dispose pas de sa propre administration : les domaines administratif, policier et économique dépendent des autorités françaises de Vichy. Les Grenoblois résistants agissent plus contre Vichy et les collaborateurs que contre les Italiens.

    Novembre 1942 : apparition des Groupes Francs (la branche armée de la Résistance) à Grenoble, lorsque la ville passe en zone occupée. Paul Vallier organise organise un véritable "maquis urbain", multipliant les exécutions et les sabotages. Les formations paramilitaires de Combat, Libération et Francs-Tireurs fusionnent en un même ensemble les MUR (Mouvements Unis de la Résistance). Le Général Delestraint (dit "Vidal") est nommé chef national de l'Armée Secrète. La section iséroise est commandée par Samuel Job, puis par Albert Reynier.

    11 décembre 1942 : obligation d'apposer la mention "JUIF" sur toutes les pièces d'identité.

    Décembre 1942 : Eugène Chavant, Eugène Samuel et Aimé Pupin installent le premier maquis sur le plateau du Vercors (dans la ferme d'Ambel), afin de créer une base d'accueil d'éléments aéroportés alliés. Un des maquis de Chartreuse bénéficie de l'aide de l'Abbé Grouès (l'Abbé Pierre) et d'André Demirleau (charpentier à Voreppe).

    De janvier à septembre 1943 : création de la milice française en janvier, puis instauration des premiers camps de concentration.

    16 février 1943 : Début du STO : les jeunes hommes âgés de 21 à 23 ans sont obligés d'aller travailler en Allemagne durant deux ans. Les réfractraires se cachent ou rejoignent les maquis. Ceux qui se réfugient dans le Vercors sont très vite pris en charge par la résistance locale, essentiellement des officiers de bataillons de chasseurs alpins dissous et d'anciens élèves de l’école des cadres d’Uriage. Le ravitaillement, l'argent, les nouvelles et les directives transitent par Grenoble.

    Chronologie : de 1939 à 1943

    Dans le même temps, Vichy ordonne une nouvelle rafle de Juifs, mais les autorités italiennes bloquent l'opération.

    24 avril 1943 : arrestation du Docteur Martin, emprisonné au fort de l'Esseillon (en Savoie).

    25 mai 1943 : attentat contre l'hôtel Gambetta, siège de la division italienne Pusteria. Il est perpétré par le groupe Armée Secrète de Louis Clavel. L'état-major italien déménage à la Maison des Etudiants (place Pasteur). Cf. "Les lieux de l'occupation et de la Résistance."

    27 mai 1943 : Création du Conseil National de la Résistance, afin d'unifier les différents mouvements de Résistance (présidé par Jean Moulin) : début du noyautage de l’administration. A Villard-de-Lans, le premier état-major du Vercors est arrêté par les Italiens. Alain Le Ray devient chef militaire du Vercors, tandis qu'Eugène Chavant accueille les réfractaires du STO et s'occupe du ravitaillement et du transport.

    Juillet 1943 : suite à l'échec du dispositif de départ pour le STO, des rafles sont organisées à Grenoble et dans le Vercors. Le 11 est instauré le début du couvre-feu sur les communes de Grenoble, Saint-Martin d'Hères, Saint-Martin-le-Vinoux, La Tronche et Fontaine.

    7 juillet 1943 : attaque de la biscuiterie Brun à Saint-Martin d'Hères, faisant un mort : le Résistant Léon Geist (Cf. Focus sur "La distillerie et la biscuiterie Brun de Saint-Martin d'Hères").

    10 juillet 1943 : les alliés débarquent en Sicile et Mussolini est destitué quinze jours plus tard : il est transporté à l'île de Ponza.

    6 août 1943 : l'Office de placement allemand réquisitionne l'Hôtel Terminus (près de la gare).

    14 août 1943 : des chambres de l'Hôtel de Savoie (près de la gare) sont réquisitionnées au profit des autorités allemandes.

    6 septembre 1943 : le Maréchal Badaglio (le successeur de Mussolini) signe l'armistice avec les alliés. Dans la nuit du 8 au 9 septembre, la 157ème division allemande prend ses quartiers à Grenoble. Des soldats italiens sont faits prisonniers, d'autres tentent de regagner l'Italie à pied, d'autres enfin rejoignent la Résistance française.

    Le séjour de l'armée italienne à Grenoble a permis aux forces de la Résistance de s'organiser, sans penser à se cacher suffisamment : cela aura de graves conséquences à l'arrivée des Allemands : la 157ème division alpine du Général Pflaum. Témoignage de Lucienne Gosse : "Le Comte de Castiglione, qui commandait la place de Grenoble, eut toujours une attitude de temporisateur. Dès cette époque, il était parmi les Italiens clairvoyants qui comprenaient que l'alliance germano-italienne les conduisait au désastre".

    9 septembre 1943 : Grenoble devient "une fournaise irrespirable" (propos du Général Le Ray) : plusieurs groupes d'extrême-droite et de miliciens mènent la guerre contre les Résistants. La guerre totale impose pillages et restrictions de toutes sortes. La plus grande partie des Juifs quittent Grenoble, tentant de trouver refuge dans la campagne dauphinoise.

    29 septembre 1943 : réquisition de l'immeuble au 28 cours Berriat pour héberger la Gestapo : des "chambres d'angoisse" et des "salons de torture" y sont aménagés. Le Gestapo déménage et réquisitionne l'hôtel Gambetta en avril 1944. Cf. "Les lieux grenoblois de l'occupation et de la Résistance".

    1er octobre 1943 : première action allemande anti-juive, à Saint-Pierre de Chartreuse, menée par le Kommando d'Aloïs Brunner. Renseignés par la préfecture et par la Milice, les services de police allemands multiplient les arrestations. L'Hôtel Lesdiguières est réquisitionné par les autorités allemandes.

    D'octobre 1943 à mars 1944 : repli des maquisards et attentats des MOI. Paul Vallier (chef de « Combat »), est abattu à Fontaine le 22 mars 1944.

    11 novembre 1943 : un millier d'habitants viennent fêter la victoire de 1918 devant le monument des Diables Bleus, mais 368 d'entre eux se font encercler, arrêter puis déporter à Buchenwald, Mathausen et Neuengamme.

    13 novembre 1943 : premier parachutage sur le Vercors, lancé par le message radio : "Nous irons visiter Marrakech".

    Nuit du 13 au 14 novembre 1943 : Le camouflage de matériel mis en place en 1940 étant devenu impossible à cause de la Wehrmacht, le capitaine Louis Nal et son adjoint Aimé Requet font sauter les 200 tonnes d'explosif et de munitions entreposés au polygone d'artillerie. C'est Aimé Requet qui a la responsabilité de l'opération : élevant des lapins dans l'enceinte du polygone, il n'attire pas les soupçons de la part des Allemands. Il se laisse enfermer au moment de la sortie des ouvriers, glisse des crayons d'explosifs confiés par Nal dans des caisses d'obus et les programme pour que l'explosion ait lieu 6 heures plus tard. Puis il descend à la cave et place une charge près de la chaudière qui doit exploser une heure avant. A minuit, heure prévue de l'explosion, rien ne se passe. Le lendemain, à 8 heures du matin, toujours rien : Requet se rend à nouveau au magasin et se rend compte qu'il n'avait pas dégoupillé les crayons. La chaudière a bien explosé, mais tout est à refaire. Dans la nuit du 13 au 14 novembre, le même mode opératoire est réitéré, avec réussite cette fois : l'explosion eut lieu à 23 heures. Les stocks convoités par les Allemands s'envolent en fumée. Les services administratifs et les ateliers sont transférés à la Caserne de l'Alma et au quartier Hoche. Les munitions encore intactes sont transférés à la Caserne de Bonne. Témoignage de Lucienne Gosse : "(...)Des canons et des munitions étaient stockés depuis 1939 dans un polygone au confluent de l'Isère et du Drac : un officier et un sous-officier d'artillerie prirent l'initiative de cette dangereuse opération, ils déclenchèrent les explosions en chaîne qui durèrent plusieurs jours et dont les nuées incandescentes étaient plus hautes que les montagnes environnantes."   Ci-dessous : le mur du souvenir érigé à proximité du polygone d'artillerie (en arrière-plan, à droite : le buste du Dr Valois ; au centre : les plaques rendant hommage à Albert Reynier, aux auteurs des explosions de la caserne de Bonne et du polygone d'artillerie, ainsi qu'aux Résistantes dauphinoises.

    Chronologie : de 1939 à 1943

    Du 25 au 29 novembre 1943 : point de départ de la répression allemande, avec la "Saint-Barthélémy grenobloise" (ou "Semaine Rouge"). Onze Résistants sont exécutés et une dizaine d'autres sont déportés par le collaborationniste lyonnais Francis André. Renseignés par les époux Girousse du Parti Franciste, les hommes de Francis André arrêtent Roger Guigue (au 15 rue Brocherie), le journaliste Jean Pain, sur qui une liste de pseudonymes de Résistants est découverte et Georges Duron (gérant d'un guichet de la Loterie nationale, place Victor Hugo). Ils sont interrogés dans une villa au 2 rue Baudelaire, avant d'être assassinés. Sur leur corps, un feuillet avec l'inscription : "Cet homme paie de sa vie la mort d'un National" (la signature de Francis André). Le 26 novembre, le Docteur Girard est arrêté à son domicile (au 60 rue Elisée-Chatin), puis le Docteur Butterlin (au 5 rue de Palanka) et Alphonse Audinos (au 22 cours Berriat). Interrogés, ils sont ensuite exécutés. En début de soirée, Joseph Bernard est abattu place Vaucanson (par erreur, car c'est son gendre, le Lieutenant Bertaux, qui fournissait au maquis des armes et du matériel). Dans la nuit, le Docteur Valois est arrêté au 5 rue de Palanka, ainsi que sa secrétaire, Suzanne Ferrandini. Puis c'est Henri Maubert (le secrétaire de Gaston Valois) qui est arrêté à la clinique des Alpes de La Tronche. Une souricière à la boîte aux lettres des Résistants se met en place, rue de Strasbourg.
    Le 28 novembre, trois autres Résistants sont arrêtés, puis déportés : Fernand Gras à Saint-Hilaire-du-Touvet, Georges Frier à Voiron et Alfred Ducollet à La Mûre. Vers 19h30 commence l'interrogatoire du Docteur Valois, qui retrouve sa cellule vers 5 heures du matin : Gustave Estadès l'assiste dans son suicide.

    Le 29 novembre, le Docteur Carrier des MUR est arrêté à Saint-Marcellin et le Docteur Bistési est exécuté à l'Institut d'électrochimie, où il travaillait. A 16 heures, l'industriel Jean Perrot tombe sous les balles à l'usine Sappey (rue Peretto). Albert Reynier échappe de peu à l'équipe de Francis André et gagne le maquis.

    En quelques jours, la Résistance grenobloise aura été très affaiblie.

    Ce même 29 novembre, Henri Gerente, le Maire de Saint-Martin d'Hères nommé par Vichy, est abattu par des Résistants.

    2 décembre 1943 : Aloyzi Kospicki met le feu aux 30 tonnes de munitions entreposées à la Caserne de Bonne. Directeur du gymnase municipal situé en face de la caserne (rue Berthe-de-Boissieux) et membre de Combat, Georges Bois (dit "Sapin") fournit les détonateurs. Les Slovènes et les Polonais enrôlés de force dans la Wehrmacht logeant dans le gymnase fournissent des renseignements à la Résistance. Initialement prévu entre 2 heures et 4 heures du matin, l'attentat a lieu à 8h10. Il est suivi de plusieurs explosions jusqu'à 11h30 : on totalise 13 morts (dont 7 ressortissants français) et 213 blessés. Dès le lendemain, le lycée Champollion est réquisitionné pour y loger les troupes allemandes. Considéré désormais comme un déserteur de l'armée allemande, Kospicki intègre le groupe franc "Petit-Louis", et se fait appeler "Eloi". Le 20 août, il est tué par une patrouille allemande, alors qu'il effectue une reconnaissance. Cf. "les lieux de l'occupation et de la Résistance à Grenoble". 

    Du 21 au 25 décembre 1943 : arrestation et exécution du Doyen Gosse et de son fils Jean, rafle de la place Vaucanson (en représailles à un attentat contre un officier allemand, plusieurs dizaines de Juifs sont arrêtés, puis toutes les personnes présentes (environ 200). Vingt Juifs et soixante autres personnes sont déportées), réquisition d'un magasin juif pour transférer le bureau de recrutement des LVF et destruction de la synagogue de Grenoble. Les raflés sont emmenés à la caserne Bayard, où un tri est opéré : les Juifs sont séparés des non-juifs, puis les femmes, les hommes âgés et jeunes non-juifs sont relâchés.

    Cette rafle constitue le point d'orgue d'une série de représailles orchestrée par Francis André, venu spécialement de Lyon.

     

    (Sources : dossier de presse sur l'exposition "LE PETIT DAUPHINOIS de 1939 à 1944" : Musée de la Résistance et de la Déportation de l'Isère ; 1939-1944 Grenoble en résistance : parcours urbains ; Justes de l'Isère : le sauvetage des Juifs 1940-1944)

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